Nous parlons beaucoup d’amour, de relations épanouies, de connexion et sur les réseaux ou même dans les films, l’amour apparaît comme un idéal sans aspérités, un état pur, sans vagues, presque sans faille. Pourtant, dans la réalité aimer n’a rien de simple.
Aimer réveille, remue, dérange, aimer fait remonter ce que l’on pensait avoir oublié.
Ce que l’on nomme amour est souvent beaucoup plus chargé qu’on ne l’imagine car derrière nos élans, il y a des échos.
Ses échos des premiers liens, des premiers manques, des premières blessures.
Oui, cela surprend mais c’est la vérité.
L’être humain n’aime jamais sans craindre de perdre, il n’aime jamais sans espérer combler un manque ancien, retenez donc ceci : il n’y a pas d’amour sans zones d’ombre ni sans ambivalence.
Nos liens portent nos histoires
Parfois, sans le vouloir nous demandons à l’autre de réparer ce que notre passé a abîmé.
Nous attendons qu’il soient toujours disponibles, toujours apaisants, toujours aimants comme si aimer c’était combler, comme si aimer c’était guérir ce que l’on n’a pas encore osé regarder.
C’est ainsi que l’on glisse vers l’idéalisation, ce mécanisme qui nous fait voir l’autre comme un objet parfait, censé apaiser chaque fissure.
Ce n’est pas de la folie, c’est la trace de nos premiers attachements. Ce sont nos « échos internes ».
Ces émotions ne sont pas des ennemies, ce sont des guides.
C’est lorsque l’on tente de les étouffer que tout commence à se dérégler avec reproches, exigences, retrait, fusion, dépendance… parfois même du clivage lorsque l’autre devient « tout bon » ou « tout mauvais » selon notre état interne.
Aimer vraiment demande d’accepter que l’autre ne soit pas un refuge parfait, c’est comprendre que la relation n’a pas à réparer ce qui nous fragilise. Ceci reste un travail nous appartenant.
C’est aussi reconnaître que ce que nous ressentons ne parle pas seulement du présent mais aussi du passé qui cherche encore sa place.
Vers un amour plus mature
« L’amour immature dit : je t’aime parce que j’ai besoin de toi. L’amour mature dit : j’ai besoin de toi parce que je t’aime. » Erich Fromm*
Un amour mature c’est un amour qui ne demande pas à l’autre de combler tous les vides mais qui accepte de regarder ce qui s’ouvre en soi chaque fois que l’on s’attache.
Cet amour sait accueillir les tensions internes sans les transformer en armes, il se construit avec la réalité de l’autre et non avec son idéalisation ou ses projections.
Alors peut-être que la vraie question n’est pas «Comment aimer parfaitement ?»
Mais plutôt « Comment aimer sans me perdre, ni demander à l’autre de porter ce qui m’appartient ? »
Aimer profondément demande de reconnaître et de distinguer ce qui relève de nos objets internes de ce qui appartient réellement à la relation présente.
C’est renoncer à utiliser l’autre comme écran de protection contre nos blessures anciennes et en développant une capacité d’autorégulation qui rende la rencontre possible.
Un amour mature n’efface pas nos zones d’ombre, il les éclaire.
Il prend sens lorsque nous cessons de réagir depuis nos mécanismes de défense et que nous osons nous présenter dans notre vérité, avec nos fragilités autant que notre capacité d’aimer.
KARUTHASAMI ORANGE Elvira
