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Approche créatrice de l’éducation

« L’idée que les enfants vont « mal tourner » si on ne leur impose pas de discipline dénote un manque
de foi dans la nature humaine. Les enfants ne sont pas par nature des monstres, mais ils peuvent le
devenir sous l’influence de parents hostiles qui étouffent leur indépendance »
Alexander Lowen


D’ordinaire, le sens que l’on donne au mot « éducation » renvoie à celui de discipline, d’obéissance à
un enseignement reçu. C’est aussi le cas dans le domaine familial ou encore professionnel.
Pourtant, l’erreur commise est la confusion fréquente de deux notions, celles d’enseignement et
d’apprentissage.


Enseigner, c’est faire de la place pour que « l’autre puisse grandir ».
Lorsque que l’on enseigne, on part de soi comme personnage principal et l’on s’adresse en toute
conscience à quelqu’un d’autre, un nouveau personnage, quelqu’un qui n’est pas soi et que l’on ne
peut modeler selon sa volonté.
Bien souvent la qualité de l’enseignement dépend de cette distinction faite entre : professeur/élève,
parent/enfant, etc…


L’apprentissage, correspond à un désir de contact avec le monde. Par exemple, on peut citer le désir
naturel et grandissant de l’enfant d’apprendre, encore et toujours.


L’apprentissage a également pour but de guider l’individu vers davantage d’autonomie, comme par
exemple à travers l’utilisation qu’il fera des connaissances acquises et qui l’aideront à « prendre
forme » et s’épanouir
dans son milieu.
Chez un enfant, l’apprentissage découle avant tout de la « qualité » des expériences émotionnelles
vécues au cours de son éducation, de la façon dont il aura abordé les différentes épreuves
rencontrées. Jusqu’où ses parents lui auront permis d’exprimer son plein potentiel dans le respect de
sa nature animale.
Son rapport au monde est ainsi déterminé en grande partie par ce qu’il aura « retenu » de son
éducation, de « l’enseignement » qu’il aura reçu de ses parents et de « l’apprentissage » qu’il en aura
fait, ce qui affectera positivement ou négativement sa capacité à tisser de bons liens autour de lui.


« L’enfant va tester son pouvoir sur le monde, et l’appréhender dans un milieu sécurisant pour,
ensuite, le déployer vers l’extérieur et l’y développer. Nous, parents, figures connues (et sécurisantes)
entrons ainsi dans un théâtre expérimental, où nos réactions sont soigneusement décortiquées et
enregistrées
» explique Déborah Heynen.


Par ailleurs, si l’apprentissage scolaire suivait la même trajectoire que les apprentissages spontanés
de l’enfant et s’il tenait compte des intérêts et des questions propres à la phase de développement
dans laquelle il se trouve, alors il n’y aurait aucune raison pour qu’il s’éloigne des histoires de
mystère et d’aventure, qu’il aura de surcroît le plaisir de pouvoir vivre en groupe.
En revanche, lorsqu’il est soumis à l’obéissance de ses parents et à la honte de ses comportements
caractérisés de « dérangeants », il aura, une fois adulte, beaucoup de mal à jouir de la vie et « se
gérer » émotionnellement.


« Quand un enfant obéit à un ordre, il est privé d’une occasion d’apprendre », nous dit Lowen.
L’autonomie de l’enfant, c’est ce qui est brisé sous les violences éducatives ordinaires (VEOs). C’est
l’expression de la grâce animale perdue au profit de la soumission à une système hiérarchique de
dominance (et par phénomène récursif, qu’il entretient lui-même).Le but étant de faire de l’enfant
un travailleur productif dans un monde où la consommation de masse fait office de religion
moderne.


« On n’enseigne pas l’Amour de soi et des autres.
On enseigne l’amour de la souffrance.
On enseigne l’amour du pouvoir.
On enseigne l’amour de la souffrance pour obtenir le pouvoir.
L’Amour, le vrai, lui est laissé au second plan, car on on ne peut aimer ce que l’on combat
 » est-il
rappelé dans SYBERNETICS (chapitre I).


Mais dans la lutte des parents face à leur enfant, l’enfant est toujours perdant, et sa soumission se
marque par le rejet de sa nature animale.
On va donc chercher à culpabiliser l’enfant pour le rendre docile, détruisant par la même son
potentiel créateur. On va le « civiliser » en faisant honte à ses agissements non « corrects ». Ce que
d’aucuns n’auront même pas honte de nommer « dressage » !


Ne pas avoir confiance en notre nature animale, c’est se condamner à une pseudo vie, une vie non
pleinement vécue, une vie faite de peurs, une vie de « petit homme » (W.Reich)
Nier notre nature animale, c’est nier la vie, c’est refuser ce qu’elle a de plus vivant à nous faire
découvrir et de plus « connectée » à notre environnement.
Devenus adultes, nous avons peur de notre nature animale car c’est celle-là même qui nous fait
rompre avec le 4ème commandement. Ainsi l’on s’imagine que s’en libérer c’est nécessairement
rompre le lien avec ses parents, rompre avec le « droit » chemin de la vie.
Brider l’enfant, le conserver sous contrôle, lui ôter sa nature animale, c’est le contraindre à être
dépendant des règles mêmes auxquelles il accordera sa survie en société (et dans la vie à plus large
échelle), celles qui fondent les valeurs de l’idéologie dominante en place. C’est mettre des frontières
à son plaisir dans le monde, c’est parfois l’atrophier à jamais.
Mais paradoxalement, plus nous cherchons à contrôler la nature et plus elle nous contrôle, insiste
Edgar Morin.
L’enfant n’a pas besoin d’être « corrigé pour son bien », comme s’il fallait le détruire pour mieux le
« reconstruire », comme si la nature était par essence imparfaite et que l’on devait la façonner, pour
la rendre plus pure.


L’enfant a simplement besoin d’être accompagné durant son éveil et de sentir que les ressources
affectives
sur lesquelles il s’appuie forment un socle suffisamment solide, lui permettant de prendre
son envol, en pleine confiance de lui-même et du monde qui l’entoure.


En ce sens, l’adulte a bien plus à apprendre des comportements d’un enfant qu’il ne le croit. Le
parent possède certes une meilleure connaissance des lois sociales et culturelles auxquelles il est
forcé de se soumettre mais bien souvent, le monde de l’adulte est devenu un monde désenchanté,
où le plaisir de vivre est peu présent. L’enfant, lui, sait bien mieux comment obtenir l’amour et se
gratifier, le faire naturellement et spontanément au sein de son environnement, il sait donner et a
besoin de recevoir en retour. Il sait le dire mais également le montrer.


Avoir confiance en son enfant, c’est avoir confiance en sa propre nature, c’est être confiant en soi-
même. C’est envisager un rapport différent à soi, et l’enfant (intérieur) ou bien celui qui se trouve en
face de nous peut nous aider à avancer dans cette démarche.


Mais quelle est véritablement l’importance d’utiliser nos capacités créatives humaines pour mieux
appréhender les comportements d’un enfant, ou bien les nôtres dans la vie ?
Edgar Morin nous éclaire : « C’est ainsi que, chez les mammifères, la lenteur du développement du
cerveau après naissance et l’ampleur des zones non spécifiées dans ce cerveau permettent la
spécification par des événements extérieurs et font participer l’environnement de plus en plus
intimement
 », La Méthode, Tome 2, La Vie de la vie.


La taille de notre cerveau est importante (supérieure aux autres mammifères de gabarit équivalent).
On dit d’ailleurs qu’à l’intérieur de celui-ci réside une sphère de l’esprit (la noosphère) permettant à
la pensée humaine de s’établir. Elle est mise en friche étroitement par notre environnement
(enrichie ou appauvrie). Il faudra du temps pour que notre cerveau se développe car il faut du temps
pour qu’il puisse arriver à une maturité créatrice (encore inégalée au sein de la nature) qui soit
source de bien-être, de plaisir et non de destruction de soi.


« La création et la joie sont au cœur de la nature et doivent être réunies ». A.L
Dans son livre, La Plaisir, Alexander Lowen utilise l’expression de « progression à rebours » pour
décrire la redécouverte de soi à travers l’enfant. Pour retrouver sa singularité, sa créativité d’enfant,
il faut aller à la rencontre de soi, pas à pas, et cela nécessite de renouer avant tout, avec son enfant
intérieur.

Il nous dit également que l’acte de création est fonction de l’inconscient :
« …Le problème est toujours perçu consciemment, mais la solution ne l’est jamais […] L’attitude
créatrice est celle qui intègre les aspects et les besoins opposés de la personnalité en une expression
unique, une réponse unitaire. L’attitude destructrice est celle qui fragmente la personnalité en
dressant un besoin contre l’autre […
] ».


C’est pourquoi, nous devons concevoir une approche créatrice de l’éducation au plus tôt, non pas
une éducation qui serve à produire seulement un idéal de soi à travers l’enfant, témoignant
seulement d’une volonté narcissique de réécrire sa propre histoire, mais à la place, redéfinir un idéal
de relation entre soi ET l’enfant englobant les besoins respectifs de chacun, un idéal vers lequel on
essaie de tendre et qui nous invite naturellement à devenir un acteur créatif au quotidien.

Cet article a été rédigé par Edouard Dusuzeau, stagiaire de l’EFPP – E-faculté de Psychologie et Psychanalyse. Pour en savoir plus sur les formations Psychopraticien, Psychanalyste, Aide à la parentalité, dispensées par l’EFPP, rendez-vous sur notre site ou contactez-nous au 01 86 90 85 35.