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La honte & la culpabilité

La honte est narcissique; la culpabilité est objectale. Ces deux notions se distinguent par leur nature, en ce que la première est narcissique, renvoyant au Moi, tandis que la seconde est objectale, mettant ce Moi dans le lien à l’Autre, c’est ce lien qui chargé en affects peut faire ressentir la culpabilité, elle peut être aussi relative à la transgression de certaines normes ou valeurs intériorisées inhérentes aux successions d’identifications à la sortie de l’Œdipe freudien.


Toutes deux résonnent chez le sujet comme un conflit, une prise avec soi-même – une gêne intense, une sensation d’inconfort psychique, accompagné de manifestations somatiques, parce que le corps “ça parle” aussi. Le sujet éprouve de la honte en lien avec sa propre existence, se sent-il en trop pour soi ? La culpabilité nous accuse d’une faute, laquelle ?
La patiente L. décrivant ces sentiments racontait : “ce regard d’homme sur moi, me rendait désirable à ses yeux et me faisait me sentir désirable, c’est ça qui m’a troublée”. En s’attachant les cheveux devant lui, sa pose anodine et désintéressée – quoi que nous n’agissons jamais par hasard comme le disait Freud1 – face à l’homme, émerveillé du spectacle auquel il assistait, ainsi cette scène convoquant la désirabilité et surtout la séduction, les deux personnes ont bel et bien pris part en tant que protagonistes – le rôle actif et séducteur de la patiente et le spectateur captivé – à une scène de séduction.

Rappelant celles des films d’amour, où la femme séduit l’homme qui lui fait face, cachant subtilement ses charmes, l’instant de nouer un chignon et d’une pose lascive, lui suggérant par son attitude des fantasmes sexuelles, alors l’homme fabrique le scénario scopique, l’homme a besoin de voir pour désirer. Chez les hommes, le sexe passe par les yeux.

Il s’agissait alors d’une scène de séduction dont l’initiatrice avait été la patiente L., se questionnant à ce moment de la cure sur ses propres capacités à être désirée, à séduire, à être aimée et à aimer. Or, cet homme-là ne l’intéressait pas, répétait-elle. Engagée justement dans son différend professionnel avec ce dernier, insistait-elle. “Je suis pensé”2 nous rappelle
inlassablement Lacan, si l’Inconscient est un langage, alors il s’est exprimé à sa place; la patiente L. s’en défendant “non, non et non, c’est impossible, ce n’est pas moi qui… puis c’est lui qui m’a regardée le premier après-tout! ”.

Honte et culpabilité mêlée, cette réaction illustre la honte de ses désirs, la culpabilité envers l’homme désirant.
Le vocabulaire de la honte :
= ne pas oser, échouer, se couvrir de honte (expression idiomatique), ne pas être à la hauteur d’un idéal à atteindre, la dépréciation de soi, la dévalorisation, compter pour rien, l’inhibition.

Le vocabulaire de la culpabilité :
= commettre un acte répréhensible, fauter, trahir la confiance d’un être idéalisé auquel l’on s’était identifié, blesser l’autre, avouer, reconnaître une vérité afin de se sentir plus léger, le poids de la culpabilité, s’en vouloir, avoir des remords, regretter, la punition, être rongé par la culpabilité.

Sources
J.Lacan, Le Séminaire (1973).
S.Freud, Psychopathologie de la vie quotidienne (1901), page 323.

Cet article a été rédigé par Cédric Denizet.

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